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Wages for Wages Against : They Say It Is Love. We Say It Is Unwaged Work

De erg

CONFÉRENCE / 18 novembre, 14h

suivie d'un

WORKSHOP / 18-19-20 novembre

Le collectif Wages For Wages Against (WFWA) s’est fondé en Suisse au printemps 2017 autour d’une campagne qui agit pour la rémunération des artistes, questionne la valeur du travail artistique et les critères de son évaluation.

Aujourd’hui, dans le domaine des arts visuels, les artistes ne sont pas ou très peu rémunéré·e·s. Cette situation repose sur un postulat, celui que l’exposition augmente la visibilité donc la notoriété des artistes qui pourront être rémunéré·e·s par la vente de leurs œuvres. Seulement, il n’y a aucune garantie et peu d’artistes ont l’opportunité de vivre de ce commerce. Beaucoup de pratiques n’ont pas leur place sur le marché de l’art car elles ne répondent pas aux critères de sélection. De la même manière, le marché ne reflète pas suffisamment les diversités, car il a tendance à valoriser des postures dominantes dans la mesure où, sous-tendu par une dynamique hautement concurrentielle, la spéculation sur l’artiste « émergent·e » sert de fabrique de la plus-value. Ainsi les femmes et les minorités (personnes racisées, personnes trans*, personnes handicapées, etc.) sont sous-représentées et cela a des répercussions globales sur l’état de l’art. Les institutions sont, de fait, tributaires de cette économie en ne payant pas les artistes, ce qui entretient ces systèmes.

De plus en plus de jeunes artistes obtiennent des diplômes au sein d’écoles d’Art et de formations spécialisées. Si leur travail artistique commence à faire l’objet d’expositions, la majorité ne demandent pas à être payé·e·s, ne signent pas de contrats et n’ont pas les moyens de prendre conseil auprès d’avocats en cas de conflit. Cette situation précarise les artistes et normalise la problématique du travail gratuit. Ils·elles doivent trouver d’autres moyens de subsistance ou simplement renoncer à développer une carrière artistique n’ayant pas les moyens de travailler gratuitement.

Notre problématique est de comprendre comment fonctionnent et se perpétuent les systèmes qui sous-tendent cette précarité. Ainsi l’investigation s’organise autour de trois questions :

-  Comment comprendre les dys/fonctionnement dans les modèles actuels ? Cela implique de regarder à la fois comment est considéré le travail artistique dans notre société, mais aussi de questionner le fonctionnement de l’économie de l’artiste à travers son statut de travailleur ainsi que le ruissellement des financements dans les institutions subventionnées. 


-  Comment ouvrir les pratiques artistiques à plus d’inclusivité, d’horizontalité et de transparence ? L’objectif est de travailler à une prise de conscience collective sur un problème structurel qui ne concerne pas seulement les milieux artistiques mais la société dans son ensemble : qui peut s’engager dans une carrière sans savoir quand et comment elle sera rémunératoire ; et comment, dans ces conditions, défendre l’idée que l’art peut adresser des questions qui touchent la société au sens large ? Nous tenterons de comprendre comment se dessinent ces frontières symboliques et comment les déconstruire dans le champ de l’art.

- Comment répondre concrètement à la problématique du travail gratuit ? Il s’agit de faire un état des lieux des débats et propositions actuels afin de comprendre ce qui a fonctionné ou échoué ailleurs. Il s’agira en outre de réfléchir à l’importance de discussions approfondies de ces questions dans les établissements d’enseignement artistique.

L’objectif du workshop est d’inclure les étudiant.e.s dans un processus de réflexion et de valorisation du travail mené depuis deux ans par une mise en perspective historique et contemporaine des actions engagées. Ces recherches doivent converger vers la publication d’une revue périodique qui problématise les différentes sources d’études sur les conditions de rémunération et le statut des artistes actuels et à venir. Elle est structurée en quatre grandes rubriques (Actualité ; Références ; Recherche ; Cartes Blanches) et à travers plusieurs types de documents : ré-impressions, enquêtes, études de cas, témoignages, entretiens, essais, etc. 

Il sera l’occasion de travailler collectivement sur cette première phase qui consiste à préciser les outils d’enquête (entretiens / questionnaires), à mettre en commun les références, documents et de données existantes et à mener des entretiens avec des acteurs locaux. L’objectif à l’issue du workshop est de pouvoir entamer le travail de coordination éditoriale de la revue : préparation de pré-sommaires en fonction thématiques choisies, entretiens et prises de contacts avec des institutions partenaires. Les étudiants qui souhaitent s’engager plus loin dans le travail auront la possibilité d’intégrer l’équipe éditorial et de contribuer à la publication du premier numéro de la revue.

TIPHANIE BLANC

Critique et historienne d’art, elle a enseigné la théorie de l’art à la HEAD–Genève entre 2012 à 2018. Depuis 2017, en tant que membre du collectif Wages For Wages Against, elle organise et intervient dans des séminaires et tables-rondes sur le sujet de la précarité du travail artistique à travers l’Europe (CCS, Paris ; Sandberg Instituut Amsterdam ; Post-Diplôme de l’ENSBA de Lyon, etc). Depuis 2007, elle a curaté plusieurs expositions dans des institutions comme Hotel Abisso (CAC, Genève, 2013), Fun Palace, (Centre Pompidou, Paris, 2010) ou IAO: exploration Exploration du Psychédélisme en France (CAPC, Bordeaux, 2008). Entre 2010 et 2012 elle s’est chargée de la programmation de Forde, espace d’art contemporain à Genève. Elle s’intéresse à l’édition à différents niveaux, depuis l’écriture jusqu’à la diffusion, et a fondé en 2013 le projet curatorial Oraibi Books, aujourd’hui La Dispersion, librairie d’art et de pensée critique à Genève.